Le jardin de Juliette
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Dans le domaine de l’agriculture biologique et de la permaculture, on parle souvent des hommes. On cite les fondateurs David Holmgren et Bill Mollison. On évoque le visionnaire japonais, Masanobu Fukuoka. On parle parfois des fermes elles-mêmes : le Bec Hellouin, Sainte Marthe.
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Mais ce monde en évolution est aussi une histoire de femmes. Dans une lettre récente, je vous ai parlé de Margaux Bounine qui a créé la ferme de Marcillac. L’extraordinaire aventure d’Incroyables Comestibles a été lancée à Todmorden au Royaume-Uni par Mary Clear et Pam Warhurst. Ces deux femmes ont révolutionné leur ville en faisant planter des légumes partout dans tous les jardins, privés ou publics. Et l'initiative a fait des émules dans de nombreux villages d’Europe. Rien qu’en France, il y en aurait plus de 400...
Aujourd’hui, je vais vous parler d’un projet qui m’a touché par sa simplicité et sa poésie. Il s’agit de la Cabane à Plantes. C’est le magnifique projet de Juliette Mallet-Krier.
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Elle, s’est lancée dans la création d’un jardin de fleurs sauvages et comestibles sur un terrain familial dans le sud de la Touraine, en friche depuis 20 ans. Petite-fille d’agriculteur et fille d’une maman jardinière, comme l’indique son site Internet, elle a toujours eu un contact privilégié avec la nature.
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Sa vie professionnelle a commencé dans l’événementiel et le tourisme entre Paris, Tours et Loches la magnifique cité-forteresse de Foulques Nerra, l’un des premiers Comtes d’Anjou. Juliette s’est progressivement intéressée au monde agricole et à l’alimentation, à travers “la “Ruche qui dit oui !” qui un réseau de vente directe du miel et des produits de la ruche.
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En 2016, avec son mari, elle se réinstalle à la campagne, là où elle a grandi. Elle suit deux formations en Indre et Loire, notamment avec le botaniste Jean-Pierre Scherer, et l’aventure commence.
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En mars 2017, la Cabane à Plantes voit le jour.
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Une ferme de fleurs sauvages et comestibles
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A peine deux ans plus tard, le projet a déjà bien avancé.
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Le média “Éthique TV” lui a consacré un reportage en juillet 2019.
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Juliette présente son domaine à la caméra.
A quelques pas de la maison en bois où Juliette vit avec son mari, est sorti du sol argileux et fertile, un magnifique jardin fleuri.
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La particularité de cet espace est que tout y est comestible ! C’est un réfrigérateur naturel.
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Y poussent des plantes aromatiques et des fleurs sauvages agréables au palet. Elles serviront à faire des condiments, des épices ou des infusions que Juliette propose dans sa boutique sur Internet ou aux restaurants bio près de chez elle.
La culture de ces plantes est faite intégralement à la main, sans tracteur, ni intrants, ni pesticides. Juliette précise utiliser la grelinette pour décompacter le sol. Sinon, les plantes poussent toutes seules !
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Des essences, des odeurs et des graines comestibles...
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Ce sont des plantes aromatiques de Méditerranée : le thym, le thym citron, la sarriette, la lavande, la monarde, l'hysope ou encore l'achillée qui s’est installée d’elle-même.
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Là il y des bacs de menthe : elle est poivrée, marocaine, ou bergamote.
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Plus loin, ce sont de la sauge, du basilic cannelle, du raifort (la moutarde alsacienne) et celui-là ? Du Shizo ! C’est le persil japonais.
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Oh ! Un cassis. Le fruit se mange mais le bourgeon et les feuilles aussi.
Tiens un rosier de Damas ! Est-ce pour l’industrie du parfum ?
Non. Pour la pâtisserie !
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Bleuets, mauve mauritanienne et menthe s’uniront pour donner une tisane bleu turquoise : la magie bleue.
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Elle a bien du succès !
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Le calendula ou soucis officinal se consomme en cuisine ou en tisane. Il est réputé avoir des vertus anti-inflammatoires et c’est une plante pour les femmes. Quant à la coriandre, n’hésitez pas à manger ses fleurs ! Votre salade n’en sera que plus belle et le goût est plus fin.
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Nous voilà devant de grands fenouils aromatiques. Les graines sont fortes mais succulentes, vous voulez goûter ?
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Plus loin, voici quelques pieds d’artichaut, cadeau de grand-père, puis le potager qui vient d’être installé.
Au bout du jardin, il y a les poules.
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Cueillette et séchage
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Si la culture ne pose pas de problème, la récolte des fleurs est, elle, chronophage. Car à peine les a-t-on cueillies qu’il en pousse de nouvelles. C’est une activité récurrente !
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Le butinage des abeilles est un bon indice, lorsqu’elles sont passées, que c’est prêt, les humains peuvent venir se servir.
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Le panier de récolte sera porté à la cabane de séchage construite grâce à un financement participatif obtenu auprès d’une plateforme soutenant les projets agricoles, Miimosa.
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Le budget était de 5000 euros. La campagne de financement a permis de récolter légèrement plus. A l’intérieur, il fait noir et sec, deux conditions indispensables pour préserver les plantes tandis qu’elles sèchent, ce qui leur prend entre un et trois jours.
Goamasios et tisanes
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Avec le fruit de ses récoltes, Juliette prépare des mélanges de tisanes ou des compositions pour la cuisine.
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Elle fait par exemple des gomasios. C’est un mélange entre du sésame torréfié, du sel marin et telle ou telle plante. Juliette en fait aux orties ou au piment d’Espelette. En cuisine, vous pouvez utiliser ce condiment en remplacement du sel. Vous profitez alors des qualités nutritionnelles du sésame qui est riche en minéraux : calcium, phosphore et magnésium ; en vitamines mais aussi en acides aminés essentiels.
Le gomasio s’utilise également dans les plats chauds en fin de cuisson, sur des légumes ou les viandes. On peut également l’intégrer dans une pâte à pain ou un carpaccio de saumon.
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Le tour du propriétaire avec Juliette et la caméra d'Éthique TV prend une petite demi-heure. La surface n’est pas immense, mais la ferme de fleurs sauvages produit déjà des quantités satisfaisantes de fleurs. Et tout ce que la ferme produit est vendu, parfois même pré-vendu tant la demande est grande ! Le problème de Juliette, en fin de compte, c’est de parvenir à faire plaisir à tout le monde… Belle ambition !
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Et demain ?
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Il pourrait y avoir en France des milliers, peut-être des dizaines de milliers de projets comme celui-ci.
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Il est probable même que d’ici quelques années, ce sera le cas. Car nous n’avons pas vraiment le choix. La seule agriculture durable est l’agriculture biologique. Elle présente par ailleurs l’avantage de permettre à ceux qui se lancent de faire des projets selon leur cœur, leurs talents et leurs envies… Quelle différence avec les mornes plaines céréalières et mortifères pour les sols que nous impose la monoculture !
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Mais pour aller plus vite, pour accompagner cet inexorable mouvement, il faut un peu de volonté politique.
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On pourrait d’ores et déjà supprimer la TVA sur les produits agricoles bio et autoriser sans attendre le diplôme et le métier d’herboriste.
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Car ces plantes sont alimentaires et médicinales. Elles sont à la lisière entre la médecine et le bien-être. C’est une très bonne place pour l’herboriste qui n’est pas médecin mais un acteur actif de la santé des populations !
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Source : Alertes Santé